Ils marchaient à côté l'un de l'autre; des danses
Troublaient le bois joyeux; ils marchaient, s'arrêtaient,
Parlaient, s'interrompaient, et, pendant les silences,
Leurs bouches se taisant, leurs âmes chuchotaient.Ils songeaient; ces deux coeurs, que le mystère écoute,
Sur la création au sourire innocent
Penchés, et s'y versant dans l'ombre goutte à goutte,
Disaient à chaque fleur quelque chose en passant.
Elle sait tous les noms des fleurs qu'en sa corbeille
Mai nous rapporte avec la joie et les beaux jours;
Elle les lui nommait comme eût fait une abeille,
Puis elle reprenait: -Parlons de nos amours.
-Je suis en haut, je suis en bas,- lui disait-elle,
-Et je veille sur vous, d'en bas comme d'en haut.-
Il demandait comment chaque plante s'appelle,
Se faisant expliquer le printemps mot à mot.
O champs! Il savourait ces fleurs et cette femme.
O bois! ô prés! Nature où tout s'absorbe en un,
Le parfum de la fleur est votre petite âme,
Et l'âme de la femme est votre grand parfum!
La nuit tombait; au tronc d'un chêne, noir pilastre,
Il s'adossait pensif; elle disait: -Voyez
Ma prière toujours dans vos cieux comme un astre,
Et mon amour toujours comme un chien à tes pieds.
Victor HUGO